Mei hua ou Fleur de Prunier

Comme nous l’expliquons dans le guide complet du yi king, il existe plusieurs méthodes d’interprétation du yi king. L’approche par le livre (les commentaires) n’exige aucune connaissance technique, mais en retour elle ne permet pas de fournir de réponses très concrètes, pratiques ou situées dans le temps.

La Fleur de prunier (mei hua yi shu, 梅花易數) demande une certaine familiarité avec les trigrammes et les qualités associées, les 5 éléments et un zeste de maîtrise du calendrier chinois. En retour, elle délivre des informations pratiques et factuelles.

Les bases de l'analyse

Côté mécanismes, l’analyse est basée sur l’interaction entre les trigrammes qui composent l’hexagramme :

  • Le trigramme fixe, c’est-à-dire sans trait mutant, représente le sujet (ti, 體). Bien souvent c’est la personne pour laquelle l’hexagramme est tiré. 
  • Le trigramme mutant est donc celui qui comporte le trait mutant, c’est l’objet (用, objet) de la question.
Les éléments des trigrammes, leur force (relative à la saison) et la nature de l’interaction entre les trigrammes nous donnent un premier élément de réponse. La mutation du trait variable et l’hexagramme résultant puis l’analyse combinatoire des tous ces éléments suivent. On comprend dès lors que la Fleur de prunier puisse produire une interprétation d’une grande richesse.

original

qian
li

résultant

qian
gen

Cette méthode d’interprétation fonctionne sur un mode essentiellement corrélatif, une bonne connaissance des trigrammes et du système des 5 éléments nourrit activement l’intuition du consultant.

Les méthodes de tirage

Dans cette approche, on utilise des méthodes de tirage ou de calcul qui délivrent un et un seul trait mutant :

  • Tiges d’achillée,
  • A partir des 4 piliers (bazi) de la date
  • Éléments du contexte dans lequel la question est posée (voir l’histoire de Shao Yong plus bas). 

L'histoire légendaire de Shao Yong

Shao Yong a marqué l’histoire du yi king. Il est considéré comme le père de la Fleur de prunier (mei hua yi shu). Cependant on considère aujourd’hui comme douteux que ce fin lettré du 11ème siècle, ait effectivement mis au point cette méthode. En revanche c’était un cosmologue passionné ainsi que le révèle l’ouvrage de Alain Arrault « Shao Yong, poète et cosmoslogue » qui rapporte différentes anecdotes illustrant les aspects de son travail se rapportant à l’étude de la cosmologie et l’une de ses applications : la divination.

Le don de prédiction est omniprésent dans les récits qui mettent en scène Shao Yong. Ainsi Shao Bowen [son fils] relate-t-il l’anecdote qui suit : un jour de l’ère Zhiping (1064-1067), son père entendit le cri d’un coucou près du pont de Tianjin dans la proche banlieue de Luoyang. Le fait n’est pas ordinaire car il n’y a pas, en temps normal, de coucou dans cette région.

Immédiatement, Shao Yong interprète cet augure : un homme venu du sud de la Chine occupera dans deux ou trois ans le poste de ministre et amènera avec lui beaucoup de compatriotes. Cela sera source de nombreux changements.

On lui demande les raisons de son interprétation. Lorsque le souffle (qi) va du nord vers le sud, explique-t-il, l’empire est bien gouverné ; si c’est l’inverse, le désordre apparaît. Les oiseaux précèdent le souffle ; le coucou, oiseau du Sud, est donc l’annonciateur d’un souffle qui va du sud au nord. Ce souffle est toujours porteur de calamités, de désordres et de maladies pour les gens du Nord. Son pronostic se révélera exact puisque Wang Anshi, originaire du Jiangxi, deviendra ministre en l’an 1070 et commencera une série de réformes avec l’appui du l’empereur Shenzong, qui provoqueront la chute de nombreux ministres originaires du Nord.

Note : Sur la circulation nord-sud, sud-nord : « le déplacement du souffle obéit également à un cycle : du sud au nord, désordre, mais après le désordre, le souffle reprend son mouvement de régulation du nord au sud. Dans son Kunxue jiwan, Wang Yinglin (1223-1296) assimile ce cycle au passage, dans le « diagramme du monde antérieur au ciel » des soixante-quatre hexagrammes, de l’hexagramme Tai [11] à Pi [12] en passant par Gu [18] (du sud au nord), puis de Pi à Tai en passant par Sui [17] (du nord au sud).

Shao Bowen, pour étayer le propos de son père au sujet du don particulier qu’ont les oiseaux, mentionne une anecdote qu’on lui a rapportée. Avant que les Song ne s’imposent, il y avait à Xizhou (au nord-ouest de la province du Gansu) une stèle de l’époque des Tang sur laquelle vinrent s’assembler des milliers de moineaux. Comme ces oiseaux n’existent pas dans cette région, les peuplades non chinoises qui l’occupaient y virent le présage funeste du retour des Han. Xizhou retomba effectivement dans le giron des Chinois avec l’avènement de la dynastie des Song.​

Alain Arrault, in Shao Yong (1012-1077), Poète et cosmologue, p. 173-175

Laisser un commentaire